Peinture de MARSO Savaro
Roi
du monde et du jour, guerrier aux cheveux d'or,
Quelle
main, te couvrant d'une armure enflammée,
Abandonna
l'espace à ton rapide essor,
Et
traça dans l'azur ta route accoutumée ?
Nul
astre à tes côtés ne lève un front rival ;
Les
filles de la nuit à ton éclat pâlissent ;
La
lune devant toi fuit d'un pas inégal,
Et
ses rayons douteux dans les flots s'engloutissent.
Sous
les coups réunis de l'âge et des autans
Tombe
du haut sapin la tête échevelée ;
Le
mont même, le mont, assailli par le temps,
Du
poids de ses débris écrase la vallée ;
Mais
les siècles jaloux épargnent ta beauté :
Un
printemps éternel embellit ta jeunesse,
Tu
t'empares des cieux en monarque indompté,
Et
les voeux de l'amour t'accompagnent sans cesse.
Quand
la tempête éclate et rugit dans les airs,
Quand
les vents font rouler, au milieu des éclairs,
Le
char retentissant qui porte le tonnerre,
Tu
parais, tu souris, et consoles la terre.
Hélas
! depuis longtemps tes rayons glorieux
Ne
viennent plus frapper ma débile paupière !
Je
ne te verrai plus, soit que, dans ta carrière,
Tu
verses sur la plaine un océan de feux,
Soit
que, vers l'occident, le cortège des ombres
Accompagne
tes pas, ou que les vagues sombres
T'enferment
dans le sein d'une humide prison !
Mais,
peut-être, ô soleil, tu n'as qu'une saison ;
Peut-être,
succombant sous le fardeau des âges,
Un
jour tu subiras notre commun destin ;
Tu
seras insensible à la voix du matin,
Et
tu t'endormiras au milieu des nuages.
Pierre
BAOUR-LORMIAN (1770-1854)
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