« Chaque livre brûlé
illumine le monde. »
Ralph Waldo Emerson
Extrait de Nature, 1836
Depuis ma petite enfance, les livres ont toujours été mes
amis. Ils m’ont souvent fait rêver à des pays, des civilisations, des voyages
que je ne ferai jamais. Ils m’ont appris à aimer le Monde, à respecter nos
différences.
Aussi quand j’ai lu ce matin, que des hommes de Deach sans foi, ni
lois, qui n’ont rien d’humains non contents de s'en prendre aux hommes, aux lieux de cultes, avaient de nouveau brûlé une bibliothèque, 8.000 livres rares, à
Mossoul ( Irak ), perdus à jamais ....
J’ai de nouveau pensé au magnifique poème de Victor Hugo écrit après l’incendie de la bibliothèque du Louvre par des Communards, le 24 mai 1871.
En brûlant des livres, c'est la mémoire de l'Humanité que l'on efface.
Prima
J’ai de nouveau pensé au magnifique poème de Victor Hugo écrit après l’incendie de la bibliothèque du Louvre par des Communards, le 24 mai 1871.
En brûlant des livres, c'est la mémoire de l'Humanité que l'on efface.
Prima
Tu viens d'incendier la Bibliothèque ?
Oui.
Oui.
J'ai mis le feu là.
Mais c'est un crime inouï !
Mais c'est un crime inouï !
Crime
commis par toi contre toi-même, infâme !
Mais
tu viens de tuer le rayon de ton âme !
C'est
ton propre flambeau que tu viens de souffler !
Ce
que ta rage impie et folle ose brûler,
C'est
ton bien, ton trésor, ta dot, ton héritage
Le
livre, hostile au maître, est à ton avantage.
Le
livre a toujours pris fait et cause pour toi.
Une
bibliothèque est un acte de foi
Des
générations ténébreuses encore
Qui
rendent dans la nuit témoignage à l'aurore.
Quoi!
dans ce vénérable amas des vérités,
Dans
ces chefs-d'oeuvre pleins de foudre et de clartés,
Dans
ce tombeau des temps devenu répertoire,
Dans
les siècles, dans l'homme antique, dans l'histoire,
Dans
le passé, leçon qu'eppelle l'avenir,
Dans
ce qui commença pour ne jamais finir,
Dans
les poètes! quoi, dans ce gouffre des bibles,
Dans
le divin monceau des Eschyles terribles,
Des
Homères, des jobs, debout sur l'horizon,
Dans
Molière, Voltaire et Kant, dans la raison,
Tu
jettes, misérable, une torche enflammée !
De
tout l'esprit humain tu fais de la fumée !
As-tu
donc oublié que ton libérateur,
C'est
le livre ? Le livre est là sur la hauteur;
Il
luit; parce qu'il brille et qu'il les illumine,
Il
détruit l'échafaud, la guerre, la famine
Il
parle, plus d'esclave et plus de paria.
Ouvre
un livre. Platon, Milton, Beccaria.
Lis
ces prophètes, Dante, ou Shakespeare, ou Corneille
L'âme
immense qu'ils ont en eux, en toi s'éveille ;
Ébloui,
tu te sens le même homme qu'eux tous ;
Tu
deviens en lisant grave, pensif et doux ;
Tu
sens dans ton esprit tous ces grands hommes croître,
Ils
t'enseignent ainsi que l'aube éclaire un cloître
À
mesure qu'il plonge en ton coeur plus avant,
Leur
chaud rayon t'apaise et te fait plus vivant ;
Ton
âme interrogée est prête à leur répondre ;
Tu
te reconnais bon, puis meilleur; tu sens fondre,
Comme
la neige au feu, ton orgueil, tes fureurs,
Le
mal, les préjugés, les rois, les empereurs !
Car
la science en l'homme arrive la première.
Puis
vient la liberté. Toute cette lumière,
C'est
à toi comprends donc, et c'est toi qui l'éteins !
Les
buts rêvés par toi sont par le livre atteints.
Le
livre en ta pensée entre, il défait en elle
Les
liens que l'erreur à la vérité mêle,
Car
toute conscience est un noeud gordien.
Il
est ton médecin, ton guide, ton gardien.
Ta
haine, il la guérit ; ta démence, il te l'ôte.
Voilà
ce que tu perds, hélas, et par ta faute !
Le
livre est ta richesse à toi ! c'est le savoir,
Le
droit, la vérité, la vertu, le devoir,
Le
progrès, la raison dissipant tout délire.
Et
tu détruis cela, toi !
-
Je ne sais pas lire.
Victor Hugo ( 1802 - 1885 )
Recueil : L'Année terrible